The North Face Ultra-Trail Tour du Mont Blanc   Rédigé par LEVASSEUR  THIERRY   le 25 Août 2006

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Prendre le départ de l’Ultra Trail du Mont Blanc représentait pour moi un rêve, un aboutissement de longues semaines de préparation, d’efforts partagés par une bande de givrés passionnés de course de montagne et réunis par l’envie de faire partager leurs plaisirs aux autres. Cet instant à été riche en émotion. 2500 coureurs partaient pour une grande aventure avec en prime la musique de Christophe Colomb. Ce fut grandiose et émouvant. J'espère que vous pouvez comprendre que malgré ma blessure au talon je ne pouvais pas manquer ce moment qui restera gravé en moi pour toujours. Arrivé la veille en compagnie de Pierrick et Valentin, nous prîmes nos quartiers dans un gîte près de Saint Gervais à une demi-heure de Chamonix. Le lendemain matin direction Chamonix pour récupérer nos dossards et poser nos sacs de ravitaillement pour Courmayeur et Champex. Nous avons rejoins par la suite Laurent et Cyril arrivés quelques jours auparavant. Ils nous ont invités à prendre le repas du midi en leur compagnie. En soirée, afin de nous distraire un peu nous avions décidé de nous rendre en boîte de nuit, euh non je me trompe, au cinéma. C’est vrai que Laurent et Babeth y ont crus. Valentin s’est endormi pendant la séance. Après une bonne nuit de sommeil nous devions penser à nous préparer et prendre le chemin du départ. Le programme de l’après-midi ne fut orienté que sur du repos. Jusqu’au moment fatidique aucune pression ne se faisait ressentir parmi nous. Nous flânions dans les rues de Chamonix…. Il est 19h, le départ est donné nous nous élançons dans les rues de la capitale de l’alpinisme. Il y a foule pour nous applaudir entre les touristes et les accompagnateurs. Ma première pensée va en direction de Rodolphe qui est resté chez lui pour cause de blessure. Les premiers filent à toute vitesse. Pour moi le départ est raisonnable, petit trot, Laurent, Cyril, Pierrick et Valentin se trouvent derrière moi à quelques centaines de mètres. Je m'arrête afin de satisfaire un besoin. Cyril en profite pour me rejoindre, il se plaint de son genou, m'accompagne jusqu'au pied de la montée du col de Voza où j'effectue un bref arrêt afin de soigner une ampoule. A ce moment Pierrick et Valentin me reprennent et m'aident à positionner mon pansement. Je sorts mes bâtons et commence l'ascension de la première montée. Le Mont Blanc rougi de son succès auprès des trailers pour finalement se cacher peu avant notre arrivée au col de Voza. Le soleil couchant est sublime, il illumine les glaciers d'un doré magnifique. Je prends une photo. Premier ravitaillement, premier encombrement pour accéder à un verre de soupe. Après plus de deux heures de course je repars tout de suite, dans les premiers lacets de la descente en direction des contamines Pierrick et Valentin me doublent. Je ne pouvais plus mettre mon pied à terre. Mon talon me faisait trop mal, je savais qu'au prochain ravitaillement je devrais m'arrêter la mort dans l'âme. C'est ce que je fis avec remords, mais il fallait se rendre à l'évidence que je n'aurais pas pu continuer. Une navette me ramena en compagnie de quelques coureurs à la case départ. Je me rendis à la voiture où j'ai dormi 3 heures sous une température de 3 degrés. Aux alentours de 6 heure du matin le téléphone sonna, ce fut Cyril qui m'annonça son arrêt aux Chapieux, puis ce fut le tour de Pierrick. Le froid à eu raison de lui. Afin de me réchauffer je décida d'aller à Courmayeur chercher Pierrick et encourager Valentin et Laurent. Aussitôt dit, aussitôt fait. Me voilà arrivé en Italie, je vis Pierrick dépité, déçu. J'imagine sa détresse, il avait les jambes et un bon moral, seul le froid et sûrement une mauvaise gestion dans son alimentation l'ont contraint à stopper. Après une heure d'attente voilà Valentin déçu d'avoir perdu son partenaire de course mais content de nous voir à ses côté lors du ravitaillement. Après plusieurs minutes ce fut au tour de Laurent d'arriver, après un rapide ravitaillement le voilà repartis à l'assaut du col Bertone. Valentin le précéda de quelques minutes, il le rattrapa dans la montée terrible du col Ferret. Pendant ce temps Pierrick et moi décidions de suivre nos deux rescapés. De Courmayeur direction La Fouly en Suisse, nous nous arrêtions à Chamonix afin de nous restaurer et pour voir les premiers franchir la ligne d’arrivée.
Après une bonne de route sous une pluie battante nous voilà arrivé à la Fouly.
Malheureusement Valentin était déjà passé à ce point de contrôle. Nous décidions de le rattraper un peu plus bas et après une courte attente nous vîmes notre valentin descendre une rue du village de Praz de Fort. Il fut très étonné de nous voir à ce moment de la course dans ce village reculé de Suisse. A Champex nous l’attendions avec impatience.
IL est 21h 09 lorsque il arriva fatigué au point de ravitaillement, la nuit et le froid commencèrent à tombée. Après avoir bu une soupe nous l’aidions à se changer car cette nouvelle nuit risquerait d’être terrible pour l’organisme. Laurent qui arriva peu de temps après Valentin ,fut très fatigué, il a fait également preuve d’un courage exemplaire, bravant la douleur qui sévissait à chaque pas effectué. Cette nouvelle nuit fût un calvaire pour nos deux compagnons. Des conditions exécrables s’abattaient sur la course, une pluie battante, un froid polaire, des rafales de vent soudaines se sont abattus sur ces valeureux guerriers faisant preuve de bravoure de persévérance à toute instant, réussissant à passer à travers. Au petit main il entamèrent la descente vers Chamonix.
A cet instant Valentin nous appela pour nous signaler sa présence à Argentière ( à 9km de la délivrance ). Laurent nous signala qu’il se trouvait au col des montets juste derrière Valentin. Nous quittions le gîte direction Chamonix, rassuré de constater qu’ils se trouvèrent toujours en course. Après une demi-heure nous voilà sur la ligne d’arrivée. Je décide d’aller à l’encontre de Valentin, Pierrick ne pouvant pas marcher correctement reste parmi les spectateurs.
Je suis là, à un peu plus d'un kilomètre de l'arrivée dans une descente en forêt à attendre Valentin . Mes yeux brillèrent, mes mains claquèrent à chaque passage de coureurs et coureuses. Après près d'une heure d'attente, lorsque je le vis au loin s'avancer je ne pu m'empêcher de verser une larme de joie. Il a beaucoup de mal à se mouvoir, j'ai mal pour lui, j'imagine les souffrances qu'ils ont endurées tout le long de ce périple. Surtout la dernière nuit où le vent, le froid et la pluie n'ont pas eu raison de leur courage. Je partage en sa compagnie les quelques hectomètres restants, l'encourageant jusqu'aux abords de l'arrivée, écoutant ses premières impressions. C'est aussi une douleur terrible au genou qui accompagne chacun de ses pas, il marche serre les dents à l'approche de la délivrance. Acclamé, motivé par des centaines de spectateurs déambulants dans les rues ou prenants un verre à la terrasse des cafés il allonge le pas et se mets à courir à quelques encablures de l'arrivée et fini enfin par la franchir en levant ses bâtons, en signe de victoire. Quelle délivrance. Laurent foulera à son tour quelques heures après la ligne en compagnie de ses enfants, venus le supporter, ainsi que sa femme Babeth.

C'est un moment magique, inoubliable dans la vie d'un coureur. Vivre une arrivée comme celle là ne peut faire regretter d'avoir arrêter plus tôt , elle donne le désir irrésistible d'y revenir , de reprendre le départ fin août 2007 et avec la même détermination que Valentin et Laurent.